L'auteur, Michel BRAUDEAU, y présente, après une intéressante et savoureuse introduction, 6 excentriques plus ou moins connus.
Je souhaite partager avec vous certains extraits et faire le lien avec la stratégie d'entreprise.
Qu'est ce que l'excentricité ? Selon le dictionnaire, ce mot qui date de 1634, désigne en géométrie un éloignement du centre. Dans le langage courant, une manière d'être, de penser, d'agir qui s'éloigne de celle du commun des hommes.
Un "excentrique" serait un individu dont la manière d'être est en opposition avec les idées reçues.
L'analogie est facile avec la manière d'entreprendre. Dans un monde d'hypercommunication, où les produits et services sont copiés très rapidement, où l'information sur ceux-ci circulent très rapidement, où les barrières à l'entrée sont de moins en moins importantes, la différenciation n'est plus une option : les entreprises doivent trouver comment formuler une proposition de valeur qui réponde mieux, ou différemment, aux besoins de ces clients de plus en plus exigeants et de moins en moins fidèles. L'alternative étant de trouver de nouveaux moyens de délivrer une proposition de valeur existante.
Alors, l'entreprise créative serait-elle excentrique ? L'excentricité serait-elle un facteur de succès dans le monde entrepreneurial ?
D'après l'auteur, un excentrique n'est pas pour autant un fou. Au contraire, il s'arrêterait plutôt au seuil de la folie, il flirte avec la frontière, la frôle sans la franchir. L'excentrique serait conscient de ses limites. Mais ce qui caractérise sans nul doute l'excentrique, c'est l'acceptation de soi.
Dans leur ouvrage, Eccentrics, a study of Sanity and Strangeness (Kodansha Globe, 1995), David Weeks et Jamie James proposent une série de traits communs de la plupart des excentriques. Examinons-les et tentons de voir si ces traits (lorsque c'est applicable à une entreprise bien sûr) peuvent constituer aujourd'hui, a priori, des facteurs-clés de succès pour nos entreprises qui évoluent dans ce monde hyper-concurrentiel.
- Non-conformisme : Oui, pour s'imposer dans des marchés globalisés, une bonne dose d'anti-conformisme est la bienvenue. Sinon, comment échapper à la stratégie du "me-too" ? La plupart des projets de nouvelles entreprises qui nous sont présentés sont de simples imitations d'offres existantes. L'exemple du Cirque du Soleil qui a secoué les propositions de valeurs du secteur est un bon exemple de non-conformisme réussi.
- Créatives : Oui également. Si l'on veut innover dans sa proposition de valeur, il faut être créatif, chercher à résoudre des problèmes qui ont de la valeur de manière innovante. Trouver les manières de faire qui créent plus de valeur.
- Curiosités : La curiosité serait un premier pas vers l'intelligence. C'est aussi à mon sens un facteur-clé de succès des entreprises actuelles. Être et rester curieux, pratiquer l'intelligence économique, stratégique, mais aussi préserver sa capacité de s'étonner.
- Idéalistes : Oui, sans doute, de belles entreprises récentes ont utilisé des idéaux pour construire de superbes entreprises. Google dont la devise est "Don't be evil" et qui en préservant le cœur de sa page de la tentation d'y mettre de la publicité, ou en évitant de faire payer les premiers résultats des recherche, s'est construit une réputation de fiabilité et d'efficacité. Ebay, dont le business modèle repose sur un idéal de confiance vis-à-vis de ses utilisateurs et surtout dans le fait que cette confiance soit importantes entre vendeurs et acheteurs.
- Obsédés : Oui, je pense que, quand on entreprend, il faut être obsédé, que ce soit par la volonté de satisfaire le client, de résoudre son problème, de chercher une solution, d'être le meilleur. Une obsession bien ciblée peut créer beaucoup de valeur ... ou de différenciation.
- Conscientes de leurs différences : Cette conscience est un des éléments-clé permettant de construire une différenciation, de formuler une proposition de valeur unique sur un marché. Plus je suis conscient de ma différence, plus je peux comprendre ce qui va permettre de me différencier.
- Intelligentes : Bien sûr, cette intelligence est un facteur-clé de succès. Elle permet une manière de voir les choses et d'exécuter qui contribue à la différenciation.
- Justesse de leur points de vue : Le positionnement adéquat sur un marché est un facteur-clé de succès. Lorsqu'un entrepreneur dispose d'un point de vue clair et précis sur le fonctionnement d'un marché, sur les besoins spécifiques de certaines catégories de clients, sur les évolutions futures de segments de marché, oui c'est un atout crucial.
- Dépourvues d'esprit de compétition et de désir de reconnaissance : Là bien sûr on peut s'interroger. Quoique : prenons l'exemple de Google dont les 2 créateurs n'avaient aucune autre ambition que de formuler un beau geste technologique dans le cadre de leur thèse. Pendant des mois, ils ont opéré sans business modèle monétisable et sans esprit de compétition, cherchant seulement à engranger de plus en plus d'utilisateurs ... et c'est bien le modèle adopté par de plus en plus d'entreprises de type web 2.0. ou d'entreprise ayant créé des océans bleus et où la concurrence n'est pas relevante.
- Mode de vie inhabituel : Oui, pour reprendre Google, le mode de gestion des ressources humaines, ou l'environnement de travail peuvent être considérés comme inhabituel. Mais est-ce un facteur-clé de succès ? Oui, sans doute, au-delà du simple alignement de l'environnement interne sur le positionnement adopté par l'entreprise, cet environnement contribue à l'ambiance de créativité et de non-conformisme qui va stimuler la production de réponses aux défis de demain.
- Indifférente à l'opinion : Oui, mais ... ! L'entreprise ne peut pas faire fi de l'opinion, c'est clair. Plutôt qu'un facteur-clé de succès, cette attitude serait plutôt un risque, surtout pour une entreprise cotée faisant appel à un financement public.
- Sens de l'humour : Oui, pourquoi pas ! Ce sens de l'humour peut rendre l'entreprise sympathique, voire faciliter la communication.
- Célibataires : Relevant ou non-relevant ? Si l'on considère qu'une entreprise célibataire serait une entreprise "stand-alone", qui évite les fusions et manie les acquisitions avec discernement pour préserver son ADN, pourquoi pas ...
- Ainés d'une fraterie ou enfants uniques : Cette caractéristique nous renvoie plutôt aux créateurs qu'à l'entreprise elle-même.
- Souffrant d'une mauvaise élocution : Ce critère n'est pas relevant bien sûr ...
En tous cas, la grande majorité des caractéristiques de ces excentriques sont des savoir-être utiles dans le processus de génération d'une entreprise qui se différencie de la norme de son marché.
L'introduction qui précède la présentation des 6 excentriques se clôture par ces mots :
"Livré aux seuls gens normaux, le monde n'aurait pas un grand avenir".
Alors, qu'en pensez-vous ? Avez-vous envie de créer une entreprise normale ou plutôt excentrique ? ;-)
Bruno Watt
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